Somnifères, calmants : seniors restez prudent·e·s !

Prendre un médicament n’est pas anodin. Pour chaque produit et plus encore en cas de polymédication(1), il est important de se poser les questions: « Quelle est la « balance bénéfice-risque »(2) ? « Est-ce que l’on a besoin de la totalité des médicaments que l’on prend déjà ou est-ce que l’on pourrait en arrêter certains ? ». 

Un médicament reste un produit chimique qui peut entrainer des effets secondaires. Certains ont des effets sur l’état de veille, provoquent de la fatigue et de la somnolence. C’est le cas notamment des antihistaminiques (médicaments contre l’allergie), des somnifères et calmants (hypnotiques, sédatifs, anxiolytiques) ainsi que des antidépresseurs. Ces médicaments, qui diminuent vigilance et réflexes, présentent donc des risques potentiels lors de la conduite d’un véhicule. Ils augmentent également le risque de chute. 

Le Service Publique Fédéral (SPF) Santé Publique, Sécurité de la Chaîne alimentaire et Environnement a lancé en 2018 une nouvelle campagne de sensibilisation afin de diminuer la consommation de somnifères et de calmants, mais également de promouvoir des alternatives plus saines. Cette dernière campagne a eu pour slogan « Somnifères et calmants, pensez d’abord aux autres solutions »(3). Même si on a constaté une diminution relative depuis le lancement de cette campagne, l’usage reste élevé : la Belgique est un des plus grands consommateurs mondiaux. 

 

A propos de la consommation de benzodiazépines

La plupart de ces médicaments appartiennent à la catégorie des benzodiazépines : diazépam, alprazolam, lorazépam, etc. Leur consommation est plus élevée chez les femmes que chez les hommes et augmente avec l’âge. Selon une enquête menée par Sciensano en 2018, au moins une personne sur dix de plus de 65 ans utilise chroniquement des benzodiazépines(4). Retenons également que cette consommation est trois fois plus élevée que la moyenne de l’OCDE(5).

Ces molécules ont beau agir rapidement sur les symptômes, elles ne s’attaquent pas à la cause. En présence de troubles du sommeil, elles ne devraient être prescrites qu’en cas de problème aigu car, bien qu’elles procurent des nuits qui semblent réparatrices, les benzodiazépines n’induisent pas un sommeil normal.

Par ailleurs, les benzodiazépines peuvent provoquer des troubles de la concentration et de la mémoire ou encore masquer une dépression. Elles peuvent aussi être à l’origine de chutes lorsque l’on doit se lever la nuit. 

Les risques d’un usage prolongé

L’usage prolongé entraîne un grand risque de dépendance (besoin irrépressible d’en consommer afin de retrouver ses effets ou d’éviter le malaise dû au sevrage). Celui-ci est aussi problématique en raison de l’apparition d’une accoutumance (tolérance) qui fait que la personne ne ressent plus d’effets lors de sa prise, ce qui amène à augmenter les doses. On continuera par exemple à avoir un effet immédiat d’endormissement mais il sera de plus en plus court dans le temps. Le somnifère deviendra ainsi de moins en moins efficace. 

Face à cette perspective, il vaut donc mieux éviter l’usage prolongé et essayer de gérer l’anxiété et les problèmes de sommeil via d’autres moyens comme l’activité physique, la relaxation, le maintien d’un environnement facilitant le sommeil ou encore l’accompagnement thérapeutique(6). 

Si l’on en prend déjà depuis longtemps et que l’on souhaite arrêter, il est recommandé de le faire progressivement. En effet, un arrêt brutal peut s’accompagner de symptômes de sevrage, tels qu’anxiété, troubles du sommeil, ou encore confusion(7). 

Conclusion  

Pour prévenir ou soulager les problèmes de sommeil, d’anxiété ou de stress :

  • Pensez d’abord aux alternatives non-médicamenteuses. 
  • Evitez les somnifères ou les calmants sauf si vous n’avez pas d’autres choix. 
  • N’arrêtez jamais la prise de benzodiazépines soudainement. 
  • Si vous souhaitez arrêter, faites-le en concertation avec votre médecin. Celui-ci ou celle-ci vous recommandera la diminution progressive des doses et l’espacement entre les prises.

Plus d’informations destinées au grand public ainsi qu’aux professionnel·le·s sont disponibles sur le site www.somniferesetcalmants.be. 

Mara Barreto 

Le saviez-vous ?

Les premières benzodiazépines furent synthétisées dans les laboratoires Roche à Bâle (Suisse). Sous le nom commercial de Librium™, le chlordiazépoxide fut introduit sur le marché en 1960.

Le diazépam (Valium™) fut quant à lui commercialisé en 1963.

Source : Y. Landry et J.-P., GIES. Pharmacologie. Des cibles à la thérapeutique ; 3e édition, Dunod, Paris, 2014, p.382 

1. Polymédication : prise quotidienne de plus de cinq médicaments différents par jour (définition quantitative) ou usage de médicaments non cliniquement indiqués ou d’associations de médicaments inappropriées (définition qualitative).

2. Balance bénéfice-risque : comparaison du risque d’un traitement avec ses éventuels bénéfices.

3. Campagne de sensibilisation SPF Santé Publique : Somnifères et calmants, pensez d’abord aux autres solutions. Disponible en ligne  : https://www.health.belgium.be/fr/sante/prenez-soin-de-vous/medication/somniferes-et-calmants

 4. J. Van der Heyden, F. Berete, S. Drieskens. Enquête de santé 2018 : Consommation de médicaments. Bruxelles, Belgique : Sciensano ; D/2020/14/440/25. Disponible en ligne: www.enquetesante.be

5.Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) : organisation internationale dont les pays membres, développés pour la plupart, ont en commun un système de gouvernement démocratique et une économie de marché.

6. O. Hanon et C. Jeandel. Prescriptions médicamenteuses adaptées aux personnes âgées. Le Guide PAPA, Frison-Roche éditions, 2015, p.76, 77.

 7. J. Belmin, P. Chassagne et P. Friocourt.Gériatrie pour le Praticien ; 3e édition, Elsevier Masson, 2019, p.787

 

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