« El Día de los Muertos » – Petite balade historique

Une fête indigène à l’origine

« El Día de los Muertos » (en français, le Jour des Morts), est l’une des plus grandes fêtes du Mexique. Elle se célèbre également dans le sud-ouest des États-Unis (parmi la communauté d’origine mexicaine) ainsi que dans de différents coins d’Amérique Latine.

Pour les peuples indigènes du Mexique, les mort·e·s ont toujours été des membres de la communauté, maintenu·e.s en vie grâce à la mémoire et à l’esprit. « El Día de los Muertos » est une tradition funéraire connue du grand public, notamment pour ses déguisements de squelettes et ses couleurs flamboyantes. 

En 2008, cette forme particulière de célébration fut inscrite au Patrimoine culturel immatériel de l’humanité de l’UNESCO. Depuis quelques années, elle devint de plus en plus populaire dans le reste du monde.

A  Bruxelles, dans les rues du quartier des Marolles, un festival annuel est organisé depuis 2018, fruit de la collaboration entre un collectif d’artistes, les habitant·e·s du quartier et un public issu de cercles élargis. Au programme (diademuertos.be) : des concerts, musique et chant pour petit·e·s et grand·e·s, une procession, etc.

Une tradition d’automne

« El Día de los Muertos » célèbre le retour transitoire sur terre des êtres décédés. On dit que ce jour-là, ils se réveillent pour venir faire la fête avec les vivant·e·s qu’ils aiment. 

Les festivités ont lieu entre fin octobre et début novembre, moment de la récolte du maïs, principale culture vivrière du pays. Dans sa version moderne, la célébration débute généralement le 31 octobre et se poursuit pendant les deux premiers jours du mois de novembre. Des traditions ancestrales méso-américaines s’associent ainsi à des fêtes du calendrier catholique, importées par les colons espagnols : le 1er novembre, jour de la Toussaint et le lendemain, jour de la commémoration des fidèles défunt·e·s.

Dans certaines communautés, les festivités dépassent ces trois jours et s’étalent entre le 24 octobre et le 3 novembre. Les styles et les coutumes peuvent varier selon les régions, en fonction de la culture préhispanique prédominante. L’État du Michoacán regorge de cérémonies et de traditions, ce qui en fait l’une des meilleures destinations où se rendre à ces dates, notamment en terre Purépecha, autour du lac Pátzcuaro et de l’île de Janitzio.

Une manière d’honorer les défunt·e·s

Les participant·e·s se déguisent, se maquillent et défilent dans les rues tout en chantant et en dansant. Il ne s’agit pas de la version mexicaine de Halloween. Bien que le thème soit aussi la mort, le but de cette célébration c’est d’exprimer de l’amour et de montrer du respect envers les personnes défuntes.

Des autels commémoratifs sont construits puis installés dans les maisons privées ou sur les tombes afin que les mort·e·s puissent se sentir accueilli·e·s lors de leur retour temporel sur terre. Ces autels sont ornés et chargés d’offrandes telles que des photos de famille, des croix et des distractions qu’iels aimaient de leur vivant ou encore des victuailles. On met aussi de l’encens pour aider à faire monter les prières vers le ciel.

Des fleurs sont placées un peu partout, spécialement des soucis ainsi que des roses et des œillets d’Inde. Le but c’est de permettre aux âmes de trouver le chemin entre le monde des mort·e·s et celui des vivant·e·s. Le dernier jour de fête, des pétales sont jetés au cimetière pour guider ces âmes vers leur lieu de repos. Des bougies sont posées devant les portes des maisons. Tout comme les fleurs, elles mènent les mort·e·s à trouver leurs parcours.

Des étapes incontournables

Les préparatifs, y compris le nettoyage et la décoration des tombes, occupent les familles plusieurs jours avant le début des festivités. Chaque membre s’applique à bien accueillir ses mort·e·s.

Une croyance locale, héritée des mythes aztèques, veut que les âmes reposent dans différents endroits selon les conditions du décès. Du coup, « El dia de los Muertos » ne dure pas une journée mais plutôt trois. Le premier jour est consacré à célébrer la mémoire des enfants décédé·e·s, appelé·e·s les « angelitos » (petits anges). Le jour suivant, les offrandes sur les autels sont dédiées aux adultes. Enfin, le dernier jour et consacré aux personnes assassinées ou décédées des suites d’un accident.

Toutes les communautés n’ont pas les mêmes rituels. Dans l’Etat de Campeche, par exemple, les habitant·e·s d’origine maya déterrent les dépouilles de ses ancêtres, nettoient les os, les placent dans une caisse en bois et les déposent dans un ossuaire. Bien évidemment, il faut attendre au moins trois ans après le décès, afin que le corps soit bien décomposé.  

Une façon de nourrir les mort·e·s

Les esprits doivent se sentir aimés et entourés lors de leur retour sur terre. On sait que voyager donne souvent faim donc les familles placent sur les autels les plats que les défunt·e·s préféraient.  

Parmi d’autres offrandes caractéristiques, on y trouve des calaveras (qu’on dépose aussi sur les tombes). Ce sont des crânes en sucre, enjolivés de motifs colorés (et parfois du nom de la personne disparue).

Les trépassé·e·s se voient aussi offrir le pan de muerto (littéralement, pain de mort), brioche saupoudrée de sucre et parfumée à la fleur d’oranger, décoré d’os, de crânes ou d’une croix faits de pâte. Son origine n’est pas confirmée : certain·e·s pensent qu’elle daterait de l’époque des colons qui auraient conçu ce pain pour en symboliser la condamnation.

L’hydratation des mort·e·s n’est pas à négliger. Pour les enfants, on place sur l’autel un verre de lait ou jus de fruit. Pour les esprits adultes, on opte plutôt pour un shooter de mezcal ou de tequila. Le pulque, une des plus anciennes boissons alcoolisées du Mexique, est également utilisé. Il s’agit d’une boisson fermentée sucrée fabriquée, entre autres à partir de sève d’agave.

Des CALAVERAS LITERARIAS

Les « calaveras literarias » (en français, crânes littéraires) font partie de la tradition mexicaine depuis la fin du 18e siècle. Ce sont de poèmes satiriques, dédiés à une personne vivante (généralement une personnalité politique) qui évoquent son passage vers l’autre monde.

Un dessin connu sous le nom de « Calavera Garbancera » accompagne habituellement les vers. Ce nom fut attribué par le caricaturiste politique José Guadalupe Posada ayant créé la première gravure (un buste squelettique d’une femme portant un grand chapeau). Le « garbancero » ou la « garbancera » (en français, marchand.e des pois chiches) était le terme utilisé pour désigner de manière péjorative toute personne qui, malgré son sang indigène, se disait européenne et renonçait à sa propre culture.

La représentation de Posadas fut reprise en 1947 par le muraliste Diego Rivera. Dans son chef-d’œuvre mural intitulé « Sueño de una tarde dominical en la Alameda Central », le mari de Frida Kahlo en fit un personnage féminin qu’il baptisa Catrina, (terme signifiant « la riche » en argot). Ce squelette féminin vêtu de riches habits devint la figure iconique du « Día de los Muertos ».

 

Envie d’en savoir plus ?

 Emanuelle Steels. Mexique : La révolution sans fin. Collection L’âme des peuples. Editions Nevicata, 2018.

 Juliette Cazez. Funèbre ! : Tour du monde des rites qui mènent vers l’autre monde. Editions Du Tresor, 2020.

 National Geographic. Día de los Muertos : dix choses à savoir sur la fête des Morts au Mexique. Disponible sur : https://www.nationalgeographic.fr/histoire/2022/10/dia-de-los-muertos-dix-choses-a-savoir-sur-la-fete-des-morts-au-mexique

 UNESCO. Les fêtes indigènes dédiées aux morts. Disponible sur : https://ich.unesco.org/fr/RL/les-fetes-indigenes-dediees-aux-morts-00054?RL=00054

 VILLE DE BRUXELLES. Dia de muertos dans les Marolles. Disponible sur : https://www.bruxelles.be/dia-de-muertos-dans-les-marolles

 Liages/Mara Barreto/201023

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